mercredi 23 novembre 2016

Pour ne pas confondre les septiques


Je dois faire un aveu. J’aime mon installation septique, un peu, beaucoup, à la folie. C’est une Écoflo, un système de traitement des eaux usées avec un biofiltre, une unité de traitement et un champ de polissage, sans utilisation d’énergie et une empreinte minimale sur notre terrain. J’en parle comme si je venais d’acquérir un tableau de Jean-Paul Lemieux. Ma table de chevet a été visitée par maintes grandes œuvres, de grands romans, des essais foudroyants, des travaux de mes étudiants à l’université, mais rien ne peut comparer à la documentation des manufacturiers de fosses septiques avec illustrations en couleur.
Les Salons de l’Habitation m’ont accueillie à bras ouverts parce qu’en autoconstruction, je cherchais des fournisseurs. Mes yeux étaient avides de trouver les immenses caissons de polyéthylène (du plastique pour les non-convertis), de béton ou de fibre de verre. Mon conjoint entretenait des discussions en rafale avec les différents fournisseurs, sur la superficie de notre propriété, sa topographie, la perméabilité et l’épaisseur du sol naturel en place. Le matin, la table de chevet était ensevelie de cette documentation et on se sentait gras dur de pouvoir faire le bon choix, car cohérence oblige avec notre mandat d’être écolo, l’installation septique demandait un système d’assainissement qui n’aurait pas d’impact sur l’environnement à l’égard de la concentration d’organismes pathogènes rejetés (coliformes fécaux). On voulait un système simple avec une performance et une fiabilité assurée. Nous prônions aussi les systèmes passifs ne requérant aucune électricité ni pièce électromécanique pour le traitement.
Le principe est très simple. Ecoflo est un système passif qui utilise un filtre biologique qui retient les polluants. La fosse septique est le système de traitement primaire où les solides et les liquides sont séparés pour amorcer la décomposition des matières organiques. Le biofiltre Ecoflo est le traitement secondaire. Dans ce mécanisme passif, les eaux usées vont dans une bascule qui les distribue sur des plaques le long d’un support central. Les eaux usées percolent à travers le milieu filtrant organique composé de fibres naturelles où elles seront finalement infiltrées dans un champ de polissage. Le filtre est fait de mousse de sphaigne. La gestion durable des tourbières ainsi que la protection des écosystèmes sont un engagement du manufacturier. Lorsque la tourbe doit être remplacée après dix ans, elle est transportée au site de compostage où elle sera utilisée en composition avec d’autres matières organiques pour faire du recouvrement de sites de revégétalisation.
Pour obtenir le permis de la municipalité, l’arpenteur géomètre doit donner la topographie du site, la pente du terrain récepteur, le niveau de perméabilité le niveau du roc, des eaux souterraines et de la couche de sol perméable. Un plan sera rédigé pour accompagner la demande de permis. C’est lors du creusage pour la fondation que la fosse septique a été installée.
Les plus chevronnés utilisent des toilettes de compostage des excréments, ou des toilettes sèches. Les Suédois en sont de grands admirateurs. Après chaque utilisation, ils versent deux louches de copeaux de bois qu’ils se procurent des scieries, et voilà, du compost. Il y a d’autres systèmes sur le marché comme le roseau épurateur, le bambou et le filtre coco. Nous avons choisi le système qui nous convenait le mieux selon les recommandations de l’arpenteur géomètre, nos conditions climatiques et LEED v4.
Il était aussi question de récupération de nos eaux grises, donc toute l’eau provenant des lavabos, la douche et la lessiveuse à l’exclusion de nos toilettes, de l’évier de cuisine ou du lave-vaisselle à cause des graisses et des matières organiques. Dans notre exubérance de vouloir être écolo et récolter des points LEED v4, nous avons frappé un mur. Notre système de fosse septique ne pouvait pas supporter la récupération des eaux grises à cause du chlore que l’on doit appliquer aux eaux souillées. Adieu récupération des eaux grises qui auraient été utilisées seulement dans nos toilettes.
Être écolo demande parfois plus de responsabilités. Une fosse septique écolo ne fait pas l’exception. Il faut la dorloter pour encourager une culture saine et la garder en condition optimale. Je ne peux pas m’empêcher de sourire à l’idée que j’encourage la culture écolo en prenant soin de mon système de traitement des eaux usées. Une culture en vaut bien une autre. Excusez-la. Je ne pouvais pas résister.

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